Territoire

À cinq mois des municipales, ce que veulent vraiment les Français en matière de mobilité

Keolis et l'Ifop dévoilent les attentes des citoyens en matière de transport quotidien avant les municipales de mars 2026. Jérôme Fourquet et Abdellah Chajai* pointent un besoin de justice territoriale.

Nous sommes à quelques mois des municipales. Quels seront les critères décisifs du choix électoral des Français ? La mobilité apparaît comme l’un d’entre eux. Une étude Keolis–IFOP, menée auprès de 4 000 personnes, le confirme : au-delà des clivages politiques, les attentes en matière de déplacements du quotidien sont très fortes, et souvent à rebours des idées reçues. Au cœur de la qualité de vie et de la cohésion des territoires, la mobilité s’impose comme un vrai sujet de société.

Invités dans cette étude à répartir un budget communal fictif, les Français consacreraient ainsi près d’un tiers de leurs priorités aux transports et à la voirie, devant l’entretien des écoles, l’environnement ou encore l’habitat. Ce chiffre en dit long : se déplacer est une nécessité vitale. Derrière la mobilité, thème qui peut sembler conceptuel, on trouve en effet l’accès à l’emploi, à l’éducation, à la santé, à la vie sociale - tout ce qui fonde le vivre ensemble.

L’action publique en matière de mobilité menée au cours des dernières années est globalement perçue de manière positive par les Français, même si la satisfaction varie selon les territoires. Alors qu’elle atteint 54 % dans les métropoles, elle chute à 39 % dans le périurbain et à 34 % dans les zones rurales. Ces écarts traduisent un besoin de justice territoriale. Les Français ne réclament pas seulement plus de transports, ils demandent surtout une réelle équité d’accès. Près des deux tiers (64 %) souhaitent que les investissements publics se concentrent d’abord sur les territoires les moins bien desservis.

Dans de nombreux territoires, cette inégalité d’accès se fait encore sentir. La voiture reste omniprésente dans la vie quotidienne : 78 % des Français l’utilisent, même si son hégémonie s’effrite. Plus d’un Français sur deux (56 %) souhaite réduire sa place dans les villes de demain. Cette aspiration dépasse les clivages et s’exprime aussi bien à Paris qu’en milieu rural. Le rapport à la voiture change. Toujours symbole de liberté, elle devient aussi une source de contrainte (coût, congestion, stationnement difficile) qui pèse sur le quotidien.

Face à cette évolution, un modèle plus souple s’impose : 31 % des Français privilégient désormais une mobilité « à la carte », fondée sur l’intermodalité, combinant transports collectifs, marche, vélo et voiture selon les besoins du moment. C’est une révolution silencieuse, à rebours des idées reçues, qui traduit la vision d’une mobilité perçue comme un ensemble équilibré de solutions complémentaires.

Mais cette diversification s’accompagne de nouvelles tensions. Près des trois quarts des Français (72 %) estiment que les conflits entre les usagers se sont aggravés, notamment entre cyclistes, piétons et automobilistes. Dans les villes, la mobilité du quotidien devient le miroir des crispations sociales. Pourtant, les solutions existent : créer des espaces dédiés, mieux informer, humaniser les déplacements, notamment par la prévention et la médiation. Cette recherche d’équilibre conditionne aussi la vitalité de nos centres-villes. Même s’ils demeurent attractifs, plus d’un quart des Français déclarent s’y rendre de moins en moins souvent, notamment faute d’une mobilité fluide et accueillante, mais aussi pour des raisons de sécurité. Redonner envie de centre-ville, c’est d’abord redonner envie de s’y déplacer, de s’y retrouver, de s’y sentir bien.

*Jérôme Fourquet est Directeur du département Opinion et Stratégies d’Entreprise de l’Ifop. Abdellah Chajai est directeur Marketing, Innovation, Développement Durable et Engagement du Groupe Keolis.

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